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Nous, les humains...

Une femme souriante avec les cheveux bouclés, portant un t-shirt jaune, se prend en selfie avec un chien noir et blanc à ses côtés, entourée de verdure.
Par Marine Coach Canin
Publié le
27
August
2016
Temps de lecture : ⏱️
5 min
Catégorie :
Violences et protection animale
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Un chiot Montagne des Pyrénées tient en gueule une friandise en peau de bœuf séchée. Ses grands yeux encore bleus ont l'air de poser des questions.

Il y a quelques mois, au détour d'une rue...

Petit être aux yeux encore bleus. Apeurée, inquiète, tu en as l'air et la chanson. Ton regard passe sur nous et mes paroles ne touchent pas l'âme de celle qui se trouve au bout de ta laisse.

Aujourd'hui, j'entends ta voix. Je ne parviens pas à savoir d'où elle vient. Les leur, aussi. Tu aboies, encore et encore, sans t'arrêter. Elles crient, et tu aboies de concert. J'entends le mot "non" plusieurs centaines de fois à travers les murs fins de cet immeuble où je passe quelques jours en compagnie de ces petits êtres qui me questionnent du regard en entendant tes cris et les leurs.

Encore et encore, tes cris, leurs cris. Et ce manège dure plusieurs heures chaque jour. 

J'entends cette phrase, "non, ça c'est non, c'est une bêtise, c'est pas bien".

Un bruit d'empoignade, et je t'entends te défendre, avec ce petit rugissement si faible, si triste.

J'entends une voix d'humaine qui te crie, teintée de colère : "ah ça c'est plus jamais, tu m'entends, jamais !".

Les larmes me montent aux yeux. Ma voix ne monte pas jusqu'à vous. Je sais que tu es en train de te faire malmener, parce que tu as osé te défendre contre une agression que tu ne comprends pas.

Le silence, à présent. Je ne sais pas où tu es.

Tu sais, tu n'es pas seule.

Tu n'es pas la seule.

Nous, les humains, nous avons beau vous aimer, ça ne fait pas de nous de meilleurs communicants pour autant.

Nous vous demandons tellement. Nous attendons de vous que vous deviniez, que vous compreniez, malgré nos difficultés à nous faire comprendre.

Nous, les humains, nous nous permettons de vous faire mal, peur, pour obtenir quelque chose de vous, quelque chose qui nous semble si important dans l'instant, bien que cela n'ait aucun sens pour vous.

Nous, les humains, nous vous mettons dans des situations effrayantes, nous vous faisons subir nos lubies, au nom de l'entraînement parfois, au nom de notre espèce, simplement, aussi.

Nous, les humains, vous reléguons au statut de chose, d'objet, de marchandise. Monnayant votre existence et vous traitant comme des accessoires de mode, comme des meubles, comme des moyens d'asseoir son autorité, sa virilité, comme moyen de combler ses manques.

Nous, les humains, nous vous faisons naître dans des conditions qui ne vous permettront pas de parcourir la vie sereinement. Nous ne vous donnons pas les outils nécessaires aux rencontres amicales et apaisées, avec les espèces, les individus, que nous vous demandons de côtoyer tout au long de votre vie. Pour ensuite vous contraindre à le faire, oubliant que la capacité à communiquer et à créer du lien n'est pas innée. Et lorsqu'inévitablement, vous signifiez votre peur, votre inconfort, votre colère, nous appelons ça "problème de comportement", et nous vous faisons du mal pour vous obliger à vous taire.

Nous, les humains, nous vous prélevons dans votre milieu de vie, celui dans lequel vous étiez libres -- libres de mourir seuls, aussi, parce que la vie de chien libre est difficile et parfois cruelle. Mais libres. Nous vous arrachons à votre liberté, liberté parfois --souvent -- mortelle, mais liberté tout de même. Nous vous attachons un collier autour du cou, et nous exigeons que vous soyez comme ces autres membres de votre espèce, nés dans des familles humaines, dépendants, habitués dès leur naissance et même avant à tout cet environnement que nous vous imposons, à toutes ces choses que l'on ne voit même plus, mais que vous, mes amis, vous devez pouvoir supporter, pour que votre existence à nos côtés ne vous soit pas trop pesante, voire même qu'elle vous soit douce et heureuse.

Nous, les humains, sommes capables de vous aimer et de vous haïr, vous qui ne demandez rien. Nous sommes capables de vous briser les os, de vous écraser des organes, de vous affamer, de vous faire mal à ces oreilles si sensibles que sont les vôtres, de vous terroriser, de vous traumatiser.

Nous, les humains, nous sommes capables, au nom de nos idées, de décider ce qui doit être bon pour vous, de ce que vous devez aimer, de ce qui doit vous apaiser, vous convenir, vous satisfaire, vous faire faire ce qu'on attend de vous. Nous nous estimons capable de savoir ce que vous pensez, ressentez, nous parlons en votre nom sans parfois même vous regarder.

Nous, les humains...

Nous, les humains.

Nous faisons aussi, parfois, de notre mieux. Vous procurer du bonheur, de la joie à vivre auprès de nous, avec vos bagages, avec les nôtres.

Nous, les humains, nous nous battons pour vous protéger de nos idées folles, de nos théories au sein desquelles vous êtes rabaissés, discriminés, au seul motif que vous êtes vous.

Nous nous battons, pour apprendre à vivre avec vous sans vous faire de peine, sans vous effrayer, et pour vous offrir de la joie à vivre à nos côtés.

Nous, les humains, nous nous efforçons aussi de vous apprendre à vivre avec nous en vous procurant du plaisir, du bonheur.

Nous vous regardons avec le désir profond de permettre à nos âmes de nous rencontrer.

Nous, les humains...

Vous, amis chiens. Vous soutenir, vous sauver, vous aider à vous reconstruire. Lire dans vos yeux la douceur sereine d'une existence pacifiée, et voir que nos maladresses à communiquer, à ressentir, à se détacher de ce trop plein d'humanité laisse un peu de place pour ces instants partagés où, ensemble, nous savourons cette vie dans laquelle nous sommes liés.